Wêrê-Wêrê-Liking, la doyenne de l’art ivoirien
Eddy-Njock N. Wetewete-Liking, épouse Gnepo, dite Wêrê-Wêrê Liking est une artiste panafricaine née en 1950 au Cameroun et installée en Côte d’Ivoire depuis 1978. Fondatrice du célèbre village Kiyi sis à Abidjan-Cocody, c’est l’une des plus grandes figures de l’art en Côte d’Ivoire. Artiste pluridisciplinaire, elle compte plus de 50 ans d’expérience dans le domaine de l’art et de la culture. Écrivaine, peintre, metteur en scène, actrice, chanteuse…, Wêrê-Wêrê-Liking excelle dans tous les secteurs artistiques.
C’est ce talent et cet énorme savoir qu’elle a bien voulu promouvoir et inculquer à ses contemporains en créant le village Kiyi en 1985. Au détour d’une exposition d’œuvres d’art à Abidjan dans la commune de Cocody, nous avons eu un court échange avec elle. » J’ai créé cette école pour concourir et promouvoir la profession de l’art d’une manière générale. Car, ce qui empêche la profession de s’exercer, c’est le manque d’espaces et d’infrastructures. Il fallait des infrastructures, malheureusement au lieu qu’il en existe de multiples, tout tend à diminuer avec la crise », explique-t-elle.
Pour cette mordue de l’art, ce manque criant d’infrastructure rend pénible l’exercice du métier d’artiste sous nos tropiques. » Rien n’est facile dans ce monde. Tout pourrait être facile pour certains si l’on a décidé déjà de faire certaines choses en éliminant d’autres, bien évidemment. Tout est difficile parce que tout demande du temps, et nous ne sommes pas les maîtres du temps. C’est grâce à Dieu que nous voyons le jour, l’inspiration et les opportunités. En Afrique, être artiste est particulièrement difficile parce qu’il n’y a pas assez d’infrastructures », fait savoir Wêrê-Wêrê-Liking.
La fondatrice du village Kiyi estime que la pratique de l’art en Afrique, est encore très peu professionnalisée. Elle encourage de ce fait, les gouvernants et les mécènes du domaine, à faire davantage en vue de permettre aux acteurs de vivre décemment de ce métier. » Ce qui permet la professionnalisation, c’est une grande offre. Il faut encore pour que cela soit possible, des infrastructures, il faut une organisation autour pour créer les conditions, il faut trouver les financements etc. Les événements que nous essayons d’organiser sont des opportunités que nous offrons aux uns et aux autres pour permettre la professionnalisation.
Créer des manifestations culturelles de grande envergure est vraiment important, car cela permet aux artistes d’avoir des échéances. Vous savez, quand un artiste travaille sans avoir de perspectives, c’est très compliqué. C’est pourquoi toutes les opportunités qui se créent sont importantes pour les artistes. Et moi, je suis toujours derrière pour soutenir », poursuit-elle
Lors de la dernière édition du Marché des Arts et du Spectacle d’Abidjan (MASA), Wêrê-Wêrê-Liking a mis sur pieds une biennale qui a permis à tous les jeunes de présenter leurs créations, surtout ceux que le Kiyi a formé. » C’est une plateforme pour eux, mais aussi pour ceux que nous soutenons et encadrons à droite et à gauche. Nous voulons qu’eux aussi puissent présenter leurs créations aux acheteurs du Marché des Arts du Spectacle Africain par exemple. Dans le cadre de l’ASCAD, nous avons créé à la fin de l’année dernière « Les premières journées théâtrales de l’ASCAD ». Cela nous a permis de réaliser un document de recherche sur le théâtre ces dix dernières années. Voilà un peu ce que nous avons pu faire ces derniers temps. A côté de tout cela, nous soutenons d’autres événements qui se déroulent à droite et à gauche et ceux qui sont en perspectives comme Abidjan Art Festival », indique-t-elle.
Wêrê-Wêrê-Liking avant de prendre congé de nous, a appelé tous les acteurs culturels à se mettre ensemble. Car, dit-elle, » c’est ensemble que nous pourrons relever de grands défis. On ne pourra pas dire que ceci est de trop, ou que cela n’est pas assez important. Je crois que plus nous participerons solidairement à des événements, plus les arts seront bénéfiques à tous », a-t-elle conclu.
Wêrê-Wêrê-Liking soulignons le, est membre de l’Académie des Sciences, des Arts des Cultures d’Afrique et des Diasporas Africaines (ASCAD).
Thom Biakpa