M. Armand Seya – Directeur général de BUTEC Afrique de l’Ouest

15 janvier 2025

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Dans un contexte où les défis énergétiques sont au cœur des préoccupations en Afrique de l’Ouest, M. Armand Seya, directeur général de BUTEC Afrique de l’Ouest, joue un rôle clé dans la transformation du paysage énergétique de la région.
Fort d’un parcours académique solide et d’une carrière riche en expériences, il incarne une vision stratégique tournée vers l’innovation et la durabilité.
Dans cet entretien, nous explorons son parcours, ses responsabilités actuelles, ainsi que son analyse des enjeux liés à la transition énergétique et à l’accès équitable à l’énergie.

 

Bonjour M. Seya, et merci pour ce temps d’entretien. Pouvez-vous nous raconter votre parcours académique et les étapes qui vous ont conduit à occuper le poste de directeur général de BUTEC Énergie et Services Afrique de l’Ouest ?

Bonjour, merci à vous pour cette lucarne qui m’est offerte à partir de ce 32e numéro d’Hamaniè.
Titulaire d’un baccalauréat série scientifique au collège catholique St Jean Bosco de Treichville dans les années 2000, j’ai été sélectionné pour intégrer les classes préparatoires technologiques à travers la filière MPSI (Mathématique Physique et Science de l’Ingénieur) de l’INP HB (Institut National Polytechnique Félix HOUPHOUËT-BOIGNY) de Yamoussoukro.
A l’issue des 2 années préparatoires j’ai été admis au concours d’entrée en cycle ingénieur àl’Ecole Supérieure d’Industrie dans le département GEE (Génie Electrique et Electronique) duquel je suis sorti en 2010 avec un diplôme d’Etat d’Ingénieur de Conception en Electrotechnique.
J’ai eu assez tôt l’opportunité de travailler dans des PME locales dans le domaine de l’énergie avant d’intégrer des groupes de renommée mondiale comme ABB, Schneider Electric, Engieet aujourd’hui BUTEC. Je suis passé par plusieurs postes du simple ingénieur dans la technique et le commercial, à des postes plus importants en responsabilités et en périmètre.
A la faveur de la cession des entités TIERI au groupe Engie, j’ai pris en Janvier 2018 la direction de l’entité Afric Power, spécialisée dans la fabrication de tableaux électriques et autres ensembles basse tension. J’ai été par la suite en fin 2021 nommé Directeur Général des entités Engie Energies et Services en Afrique de l’Ouest. A l’issue du rachat des entités africaines d’Engie services en Avril 2022 nous avons rejoint le groupe BUTEC dans lequel j’ai l’honneur de diriger les filiales basées en Afrique de l’ouest.
J’ai suivi durant ce parcours professionnel plusieurs formations dont le PMD (Program for Mangement Development) issu des business schools MDE de Côte d’Ivoire et IESE de Barcelone. Passionné de digital en plus de l’énergie, je suis titulaire d’un Digital Transformation Facilitator Certificate de l’ESCP Business School de Paris.
J’ai par ailleurs reçu plusieurs distinctions dans des catégories de jeunes leaders africains influents avant de recevoir le grade de Docteur Honoris Causa décerné par le Centre de Valorisation Professionnel de Tunis (CVPT) et L’Institut Africain de Recherche Pluridisciplinaire Appliquée (IARPA) à l’hôtel Sofitel d’Abidjan le 13 novembre 2024.

 

Quels ont été les moments forts de votre carrière, et comment ces expériences ont-elles façonné votre vision de l’énergie en Afrique ?

J’ai eu l’opportunité de participer à plusieurs projets qui m’ont permis au fil de l’eau de construire la vision que j’ai aujourd’hui de l’énergie en Afrique.
J’ai travaillé en tant qu’ingénieur d’affaires pour une PME ivoirienne il y a plus de 10 ans spécialisée dans le domaine des économies d’énergie par la mise en œuvre de solutions de gestion technique centralisée dans les bâtiments. J’ai été frappé par l’efficacité de ce système digital de supervision qui a permis pour de grands bâtiments administratifs à Abidjan-Plateau d’obtenir des économies importantes allant jusqu’à 30% de la consommation globale du bâtiment. J’ai compris par cette expérience que la gestion active de l’énergie d’un site par des solutions digitales pouvait être le principal atout de réduction de sa consommation et que des gains substantiels pouvaient être générés.
J’ai travaillé sur des projets d’accès à l’énergie chez ENGIE et BUTEC par extension des réseaux électriques conventionnels centralisés ou par installation de mini-réseaux solaires en configuration décentralisée qui m’ont permis de me plonger dans la réalité du besoin d’accès à l’énergie dans plusieurs pays africains. Chez BUTEC nous avons également un savoir-faire poussé dans le métier de la maintenance en général. Nous opérons et maintenons des centrales photovoltaïques de petite et de grande envergure, garantissant leur performance en durabilité et production, et contribuant à l’accès à l’énergie pour les populations. L’urgence dans nos pays demeure malgré tous les efforts mis en œuvre à travers d’importants investissements pour favoriser l’accès à l’énergie. Aujourd’hui encore, le taux d’accès à l’énergie en Afrique de l’Ouest, de 52% reste largement inférieur au taux mondial de 91%.
Je me suis confronté dans l’une nos entités que j’ai eu l’honneur de piloter entre 2018 et 2021 à la contribution de l’innovation technologique dans l’efficacité et la sécurité énergétique. Nous avons dans plusieurs projets réalisés pour nos clients dans les secteurs tertiaires, industriels, santé, télécoms, etc. des projets dans lesquels nous avons conçu des solutions(tableaux de distribution, smart panels, inverseurs NS, batteries de condensateurs, variateurs de vitesse, etc.) adaptées aux besoins des clients tenant compte au cas des exigences en matière de disponibilité, de sécurité, d’efficacité, de qualité et de connectivité de l’énergie.

 

Quels conseils donneriez-vous à ceux qui souhaitent évoluer dans le secteur énergétique en Afrique ?

Pour aborder efficacement les enjeux énergétiques en Afrique, trois éléments fondamentaux s’imposent : la passion, l’expertise et une profonde compréhension du terrain.
Tout d’abord, il faut de la passion. Derrière les problématiques énergétiques se cache une véritable cause humaine et environnementale. Cette cause doit être perçue, comprise et pleinement adoptée par les acteurs du secteur. L’engagement à contribuer à un meilleur accès à l’énergie, tout en préservant la planète, doit être sincère et ardemment désiré.
Ensuite, il faut de l’expertise. Les solutions technologiques liées à l’énergie ne s’improvisent pas. Ce n’est pas un domaine où l’on peut se permettre des approximations. La mise en place de systèmes énergétiques performants, sûrs et durables requiert un savoir-faire éprouvé. Ces systèmes doivent garantir un haut niveau de rendement sur le long terme, tout en assurant la sécurité des opérateurs et des utilisateurs.
Enfin, il est crucial de s’imprégner des réalités du terrain africain. Chaque étape de la chaîne – qu’elle soit financière, socio-politique ou technique – doit tenir compte des particularités locales. L’Afrique présente des singularités qui ne peuvent être ignorées. J’ai personnellement constaté des situations où des systèmes importés, pourtant réputés performants, ont totalement échoué une fois confrontés aux rudes conditions environnementales locales. De même, des modèles économiques de projets ayant prouvé leur efficacité ailleurs se sont révélés inadaptés dans notre contexte.
Développer des projets viables en Afrique nécessite donc une compréhension approfondie des besoins des États, des entreprises et des populations. Cette approche, combinée à une expertise technique solide et à une passion pour la cause, est la clé pour réussir dans le domaine de l’énergie en Afrique.

 

En tant que directeur général, quelles sont vos principales responsabilités au sein de BUTEC Afrique de l’Ouest ?

En tant que directeur général j’ai la charge du développement durable de nos entreprises dans les 8 pays d’Afrique de l’Ouest dans lesquels nous sommes implantés : Côte d’Ivoire, Togo, Bénin, Burkina, Mali, Niger, Ghana et Sénégal. Cette croissance passe évidemment par unefeuille de route clairement définie en collaboration avec le groupe impliquant pour chacun de nos métiers (cités plus loin) une stratégie de développement.
Le directeur général incarne également l’identité de l’entreprise. BUTEC a des valeurs fortes inculquées par le fondateur du groupe, à savoir : respecter nos engagements vis-à-vis de nos partenaires, atteindre nos objectifs quelles que soient les difficultés, exceller commercialement, techniquement et opérationnellement, et surtout faire preuve d’une éthique à toute épreuve pour garantir la pérennité et le succès de nos entreprises.
BUTEC attache également une importance prépondérante aux synergies entre les entités, à la transmission du savoir et à la montée en compétence des équipes locales. Le directeur général a la mission de créer sur son périmètre ce cadre favorisant les échanges et le support nécessaire au développement de chaque entité là elle se trouve. En somme, un seul groupe capable de pleinement se déployer dans toutes ses géographies.

 

Quels projets majeurs sont actuellement pilotés par BUTEC en Afrique de l’Ouest ?

Dans le cadre de nos activités, nous menons plusieurs projets d’envergure dans différents domaines, comme détaillé ci-dessous :
Solutions électromécaniques
Nous travaillons avec plusieurs clients BtoB stratégiques pour concevoir et mettre en œuvre des installations techniques couvrant tous les corps d’état : électricité (courants forts et faibles), systèmes mécaniques, climatisation, automatismes, etc.
Secteur tertiaire
Nous réalisons des projets de construction de sièges de banques dans plusieurs pays de la sous-région, notamment en Côte d’Ivoire, au Burkina Faso, au Sénégal, au Niger et au Mali.
Industrie
Nous sommes engagés dans la construction, l’extension et l’automatisation d’unités industrielles dans divers secteurs : agroalimentaire, coton, caoutchouc, et bien d’autres.
IT et télécoms
Nos projets incluent la construction de datacenters, l’extension de salles IT, ainsi que l’installation d’équipements d’alimentation électrique sécurisée et de secours.
Transport et distribution d’énergie
Nous construisons des réseaux de transmission et de distribution d’énergie, comprenant des postes et des lignes électriques.
Énergies renouvelables et efficacité énergétique
Nous concevons, construisons, opérons et maintenons des centrales photovoltaïques pour des clients privés (BtoB) dans différents secteurs, ainsi que pour des organes étatiques et internationaux. Ces solutions décentralisées incluent des mini-réseaux et des centrales de petite et moyenne taille.
Facility management
Nous pilotons plusieurs contrats stratégiques avec des clients issus des secteurs des datacenters, banques, télécoms, grande distribution, et industrie. Nos équipes assurent la maintenance technique tous corps d’état de nombreuses installations.
En Côte d’Ivoire, au Burkina Faso et au Niger, nous gérons des dizaines de contrats, parmi lesquels figurent l’exploitation et la maintenance de centrales photovoltaïques de moyenne et forte puissance. La plus importante d’entre elles, située au Burkina Faso, produit environ 70 GWh par an.
Grands projets EPC
Nous accompagnons les États africains dans leurs ambitions de construction d’infrastructures à travers de grands projets clés en main dans des secteurs variés : eau, énergie, industrie, hydrocarbures, etc.

 

Comment BUTEC répond-elle aux besoins énergétiques croissants des pays de la sous-région tout en intégrant des solutions durables ?

La sous-région fait face à des besoins énergétiques croissants, révélant un déficit d’infrastructures performantes capables de suivre la courbe de la demande. BUTEC, fort de sa solide expérience et de son savoir-faire, s’est donné pour mission d’accompagner les autorités publiques et les entreprises privées dans leur transition énergétique, en mettant l’accent sur la construction d’infrastructures efficaces et durables.
Notre force repose sur une riche expérience de plus de 60 ans, marquée par la livraison réussie de projets complexes d’ingénierie et de construction, souvent dans des environnements défavorables. BUTEC a débuté son parcours au Moyen-Orient, dans le domaine de l’EPC (Engineering, Procurement, Construction), avant de diversifier ses activités.
Depuis une vingtaine d’années, nous avons intégré la délégation de services publics dans les secteurs de l’électricité, ainsi que la distribution et le traitement de l’eau (utilities services). Plus récemment, nous avons renforcé notre expertise dans les solutions électromécaniques pour le secteur tertiaire et l’industrie, ainsi que dans les services de maintenance et l’efficacité énergétique (facility services).
Ces deux dernières spécialités, qui étaient déjà présentes au sein du groupe, ont été significativement développées grâce à l’acquisition, en avril 2022, des entités services du groupe ENGIE en Afrique. Cette acquisition stratégique a confirmé la volonté de BUTEC de s’implanter durablement sur le continent, de continuer à investir et de contribuer activement à la réalisation des objectifs fixés par les ambitieux plans de développement durable en cours dans nos pays.

 

Le secteur énergétique est confronté à des défis liés à la sécurité énergétique et à l’accessibilité. Comment les pays ouest-africains peuvent-ils surmonter ces défis, selon vous ?

L’Afrique de l’Ouest affiche un taux d’accès à l’électricité globalement faible, avec certains des pays les moins électrifiés au monde. Pourtant, cette région se distingue par une augmentation rapide de la consommation électrique, conséquence directe de la nécessité d’électrification pour accompagner son développement et de sa croissance démographique : 800 millions d’habitants sont attendus d’ici 2050, contre 447 millions aujourd’hui.
La demande en énergie électrique au sein de la CEDEAO, qui s’élevait à 15,3 GW en 2018, a atteint 21,3 GW en 2022 et devrait progresser à 26,8 GW en 2025, selon les projections de l’AFD. Ces chiffres soulignent l’urgence d’actions efficaces pour répondre aux besoins croissants.
Progrès réalisés grâce aux projets d’intégration régionale
Des initiatives ambitieuses, portées par le WAPP (West African Power Pool), visent à intégrer les réseaux électriques nationaux dans un marché régional unifié de l’électricité. Parmi les projets phares, on peut citer :
La dorsale nord : une ligne haute tension (330 kV) de 832 km reliant le Nigéria, le Niger, le Burkina Faso, le Togo et le Bénin, financée par l’AFD.
Le projet CLSG : une ligne haute tension (225 kV) de 1 357 km connectant les réseaux de la Côte d’Ivoire, du Liberia, de la Sierra Leone et de la Guinée.
Les organisations régionales, comme l’OMVS et l’OMVG, jouent également un rôle central en pilotant des projets de production et de transport d’énergie à l’échelle régionale.
Énergie décentralisée : une solution complémentaire et durable
Parallèlement aux efforts d’intégration régionale, l’énergie décentralisée représente une solution clé pour améliorer l’accès à l’électricité, en particulier dans les zones rurales éloignées. La construction de mini-réseaux solaires, proches des populations, permet d’offrir une alternative viable et rapide pour répondre aux besoins des localités difficiles d’accès.
Lancé fin 2022, le programme AMP Africa Minigrid, financé par plusieurs bailleurs internationaux et coordonné par le PNUD en collaboration avec les États, vise à adopter de nouveaux modèles d’alimentation électrique. Ces mini-réseaux, indépendants des réseaux nationaux, sont moins coûteux, plus rapides à installer et respectueux de l’environnement.
De manière générale, le programme de mini-réseaux pour l’Afrique prévoit de desservir 21 pays du continent. Selon une modélisation du PNUD, cette approche représente la solution la plus économique pour fournir de l’électricité à 265 millions de personnes d’ici 2030.

 

Avec l’essor des partenariats public-privé dans le domaine de l’énergie, quelle est votre vision pour maximiser leur impact en Afrique ?

Les partenariats Public-Privé (PPP) permettent aux autorités publiques de lancer de grands projets d’intérêt général tout en échelonnant les coûts sur une longue durée. Ces partenariats fonctionnent particulièrement bien lorsque les technologies et l’innovation du secteur privé se conjuguent avec les incitations du secteur public, assurant ainsi la livraison des projets dans les délais impartis et dans le respect des budgets alloués.
Pour maximiser l’impact des PPP, il est essentiel que les autorités publiques conçoivent des plans directeurs solides et bien structurés. Ces plans doivent définir les besoins à moyen et long terme dans chaque secteur d’activité. Dans le domaine de l’énergie, par exemple, ils doivent traduire les orientations des politiques énergétiques nationales et détailler les étapes clés pour atteindre les objectifs fixés à court, moyen et long termes, tels que les horizons 2030, 2040 et 2050. Une planification rigoureuse dans le temps et l’espace garantit la viabilité et l’attractivité des projets, créant ainsi un environnement fertile pour tirer pleinement parti des avantages offerts par les PPP.
Un cadre de collaboration efficace repose également sur la transparence, la bonne gouvernance et la stabilité socio-politique. Ces éléments sont cruciaux pour instaurer un climat de confiance mutuelle entre les secteurs public et privé. Par ailleurs, des mécanismes incitatifs, tels que des politiques attractives et des garanties adaptées, sont nécessaires pour séduire les investisseurs et renforcer leur engagement envers les projets locaux.
Du côté des investisseurs privés, une approche flexible et adaptée aux réalités locales est primordiale. Cela implique d’intégrer les acteurs locaux à tous les niveaux, depuis la conception jusqu’à l’exploitation. En allant au-delà des aspects techniques de construction et de transfert d’actifs, les investisseurs peuvent soutenir un développement socio-économique durable, contribuant ainsi à transformer les communautés où ils opèrent. Une telle vision inclusive maximise non seulement l’impact des projets, mais également leur acceptabilité et leur pérennité.

 

Quelles sont les tendances technologiques ou stratégiques que vous voyez transformer le secteur énergétique en Afrique dans les prochaines années ?

Les analyses géospatiales révèlent que pour répondre efficacement aux besoins en électricité des populations du Sahel et, par extension, de l’Afrique de l’Ouest, plusieurs technologies doivent être mises en œuvre de manière complémentaire. L’extension des réseaux électriques permettra de raccorder près de la moitié des ménages sans accès à l’électricité, notamment dans les zones densément peuplées comme le Sénégal et la Mauritanie. Les mini-réseaux joueront un rôle crucial en connectant un tiers de la population, tandis que les systèmes solaires individuels offriront une solution rapide et économique pour environ un cinquième des ménages concernés. Il est donc impératif que les programmes énergétiques actuellement en cours respectent leurs calendriers et atteignent pleinement leurs objectifs.
Les découvertes récentes de gisements pétroliers et gaziers en Afrique de l’Ouest représentent une opportunité majeure pour améliorer l’accès à l’électricité et renforcer la sécurité énergétique de la région. Parmi les principales découvertes figurent les gisements de Calao et Baleine en Côte d’Ivoire, de Bir Allah en Mauritanie, de Sangomar au Sénégal et de Kafra au Niger. Le gaz de Yakaar-Téranga, au Sénégal, alimentera quatre centrales électriques, réduisant ainsi le coût de l’électricité pour les populations locales. En revanche, le gaz de Grand Tortue Ahmeyim (GTA), situé dans les eaux sénégalo-mauritaniennes, est principalement destiné à l’exportation, répondant davantage à des enjeux économiques que sociaux.
Les États d’Afrique de l’Ouest intensifient leurs efforts pour créer un cadre favorable au développement des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique, conformément aux objectifs de mix énergétique qu’ils se sont fixés pour 2030. En Côte d’Ivoire, des projets tels que Ferké Solar, Kong Boundiali (solaire), Biovéa (biomasse) et Gribo Popoli (hydraulique) permettront d’atteindre une part de 47 % d’énergies renouvelables dans la capacité de production nationale d’ici 2030. De manière similaire, la Banque mondiale a approuvé en 2022 un financement de 311 millions USD pour le projet RESPITE, qui vise à renforcer la capacité d’énergies renouvelables dans des pays comme le Libéria, la Sierra Leone, le Tchad et le Togo, tout en facilitant l’intégration régionale grâce à l’installation de 106 MW d’énergie solaire photovoltaïque et 41 MW de capacité hydroélectrique.
Sur le plan technologique, la digitalisation s’impose progressivement dans le secteur énergétique africain. Combinée à l’Intelligence Artificielle (IA), elle permettra d’optimiser l’exploitation et la maintenance des réseaux électriques, réduisant ainsi les pertes et augmentant leur efficacité. L’IA contribuera également à une meilleure gestion de l’énergie, en facilitant des décisions éclairées et une utilisation durable des ressources. Par ailleurs, la digitalisation jouera un rôle clé dans l’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments en Afrique, grâce à des solutions innovantes de supervision et de pilotage.
Les solutions de stockage d’énergie deviendront essentielles pour stabiliser l’approvisionnement énergétique et pallier l’intermittence des énergies renouvelables. De même, l’électrification des transports, qu’ils soient personnels ou collectifs, réduira la dépendance aux combustibles fossiles et limitera les émissions de gaz à effet de serre dans un secteur particulièrement énergivore.
Enfin, l’hydrogène vert, bien qu’encore émergent en Afrique, pourrait jouer un rôle déterminant dans les années à venir. L’Africa Green Hydrogen Alliance (AGHA), qui regroupe des pays comme l’Égypte, le Kenya, la Mauritanie, le Maroc, la Namibie et l’Afrique du Sud, catalyse le développement de cette ressource. L’Afrique a l’opportunité de devenir un acteur majeur du marché mondial de l’hydrogène vert, réduisant sa dépendance aux combustibles fossiles tout en contribuant à un avenir énergétique durable et prospère.

 

Quels sont, selon vous, les principaux défis à relever pour garantir un accès équitable et durable à l’énergie en Afrique ?

Garantir un accès équitable et durable à l’énergie en Afrique reste un défi majeur, en raison de multiples obstacles structurels, financiers et techniques.
Le premier défi réside dans l’insuffisance des infrastructures énergétiques. Dans de nombreuses régions rurales, les réseaux électriques sont obsolètes ou inexistants, limitant drastiquement l’accès à l’électricité. Cette situation freine non seulement le développement économique mais aussi les services essentiels tels que l’éducation et la santé.
Le manque d’investissements significatifs dans les infrastructures énergétiques constitue un autre frein majeur. Les financements restent insuffisants pour répondre à la demande croissante en énergie, ce qui ralentit la réalisation de projets d’envergure capables de transformer durablement le paysage énergétique africain.
L’intermittence des énergies renouvelables, comme le solaire et l’éolien, représente également un défi important. Ces sources d’énergie nécessitent des solutions de stockage efficaces et des systèmes de gestion intelligente pour garantir une fourniture stable et continue. Sans ces innovations technologiques, l’expansion des énergies renouvelables pourrait être limitée dans son impact.
Par ailleurs, les coûts élevés de l’énergie, en particulier dans les zones non connectées aux réseaux, rendent l’électricité inabordable pour de nombreuses populations. Cette problématique appelle à des modèles économiques inclusifs, tels que des subventions ciblées ou des tarifs adaptés, pour garantir un accès à faible coût.
Enfin, la gouvernance et les régulations doivent être considérablement renforcées. Un cadre réglementaire transparent, stable et incitatif est essentiel pour attirer les investisseurs, sécuriser les financements et assurer la mise en œuvre de projets énergétiques durables.
Surmonter ces défis nécessite une approche collaborative et multisectorielle. Les gouvernements doivent jouer un rôle clé dans l’élaboration de politiques publiques robustes et dans la coordination des efforts. Les investisseurs privés peuvent apporter des financements et des innovations technologiques, tandis que les communautés locales doivent être intégrées dans les processus décisionnels pour assurer l’adoption et la pérennité des solutions mises en place. L’innovation, en particulier dans les domaines de la digitalisation et des énergies renouvelables, devra être au cœur des stratégies pour garantir un avenir énergétique durable et équitable pour tous.

 

Mot de fin

Les pays africains regorgent de ressources énergétiques suffisamment importantes et variéespour répondre non seulement aux ambitions de la transition énergétique en matière de mixité, mais également à la forte demande en énergie conséquence de l’urbanisation galopante des villes africaines qui affichent des projections exponentielles à l’horizon 2050.
Dans un tel écosystème, l’accès à des financements internationaux adaptés ainsi que la coopération entre les Etats et des partenaires internationaux crédibles, installés dans les pays au plus près du besoin et disposés à investir dans le long terme comme BUTEC s’avère être d’une évidente nécessité pour relever le défi.
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