Africa CEO Forum 2023 – Pour que le lion africain rugisse

De 300 à 3000 : comment accélérer l’émergence de la prochaine génération de champions africains. Tel était le thème de cette nouvelle édition, la 9e, qui s’est déroulée dans la capitale économique ivoirienne et ce pour la 4e année consécutive. Ce rendez-vous, devenu un incontournable du continent a vu la participation de personnalités de haut niveau, issues des secteurs public et privé. 

 

Le thème choisi cette année est révélateur de la prise de conscience de l’urgence de la mise en place d’un environnement favorable à l’éclosion de plus de champions nationaux, continentaux. 

Et les données à ce sujet sont éloquentes : l’Afrique compterait 345 entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à un milliard de dollars, soit dix fois moins qu’en Asie, huit fois moins qu’en Europe et cinq fois moins qu’au Canada. 

Le rapport de McKinsey intitulé Reimagining economic growth in Africa: Turning diversity into opportunity, fournit des détails intéressants. 

Plusieurs pistes semblent émerger pour parvenir à atteindre les objectifs. Ce sont entre autres la levée des barrières réglementaires et le renforcement du dispositif éducatif en vue d’avoir un important vivier de talents. 

Sur le 1er point, des zones comme l’UEMOA ou encore la CEDEAO sont des avancées notables, même si de nombreux défis y persistent. Cependant, l’effectivité de la ZLECAF serait un tournant majeur, avec l’accès aux entreprises à un vaste marché de plus d’un milliard d’habitants. Selon la Banque Mondiale : « La Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) pourrait permettre aux pays africains de faire sortir de l’extrême pauvreté 30 millions d’habitants et d’accroître le revenu de 68 millions d’autres personnes qui vivent avec moins de 5,50 dollars par jour. »

Pour ce qui est du second point, les caractéristiques démographiques de l’Afrique en feront l’aire géographique avec la plus grande population en âge de travailler. Selon Acha Leke, Partner chez McKinsey, l’Afrique aura 800 millions de personnes de personnes qui entrent sur le marché du travail dans les 25 à 30 prochaines années. Le défi de la formation de ce vivier est donc crucial, pas seulement pour l’Afrique, mais pour le monde, d’autant plus la force de travail en Occident et même en Chine sera en déclin. 

Au-delà des deux points sus-mentionnés, il faudrait travailler, au niveau de chaque Etat, à la construction d’un véritable écosystème favorable à la création et à la croissance des entreprises. Un élément qui revient souvent est l’accès au financement, qui est un véritable parcours du combattant sur le continent. Combien d’entrepreneurs sont capables d’accéder à du love money pour démarrer leur activité ? Ensuite, parmi ceux qui y parviennent, combien arrivent à passer en pre-seed, seed, série A, B et C ? Combien d’incubateurs et accélérateurs avons-nous sur le continent ? Et c’est là où des initiatives comme le MStudio et le CI20 en Côte d’Ivoire, ou encore Afrilabs et ActiveSpaces de Rebecca Enonchong prennent tout leur sens. 

L’accès à l’électricité, à internet, à des infrastructures de mobilité et de connectivité performantes est aussi un autre défi. Sur ces questions, le rôle des pouvoirs publics est également capital, comme le relevait le 1er ministre de Côte d’Ivoire lors de son intervention face à Marwane Ben Yahmed, et aux côtés de son homologue du Maroc. 

En somme, les défis qui attendent les pays africains dans l’optique de la multiplication par dix de leurs champions (entendre ici avec un chiffre d’affaires supérieur à un milliard de dollars), restent très importants. Il n’y a ici rien d’impossible, mais il faudra faire preuve de volontarisme pour permettre enfin au lion africain de rugir. 

 

Par Emmanuel Mian

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